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Se plonger dans les imaginaires d'afrodescendants et des continents noirs

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Gilles Gbeto - La rivale de Dieu (2022)

La Rivale de Dieu de Gilles Gbeto : une philosophie du destin.

 La Rivale de Dieu est une production scripturale dont l’appartenance générique relève du roman. Editée par ‘’Vénus d’ébène’’ dans la Collection Oniris en 2020, elle a reçu le Grand Prix Littéraire du Bénin 2020. Elle est composée de 185 pages et est structurée en 12 chapitres. Les personnages principaux de ce roman sont : Karl-Peter ( Yin’dé), Orphée et la mère de Karl. Les personnages secondaires sont : les frères de Yin’dé, son père, le Père Rodrigue, Gopali, le Père Kpengla et Jeannot. L’histoire se déroule dans les grandes villes du Bénin (Cotonou, Natitingou, Porto-Novo et Calavi). Les faits qui s’y déroulent sont vraisemblables et se rapportent à la réalité. Gilles Gbeto nous installe dans un réalisme prégnant dont la notion du temps repose sur des analepses et des prolepses.

  • D’un destin à un autre

Le destin désigne une puissance supérieure à la volonté humaine qui régirait le cours des événements. Il est cette puissance responsable de tout événement que compose la vie humaine sans que l’homme ne puisse faire un choix quelconque : c’est donc une fatalité parce que l’homme ne rien y changer.

En effet, le programme de vie établi par Karl et son père a connu une déchéance brutale, et ceci, à cause de la mort de ce dernier. La mort est donc venue comme une fatalité :

 […] maman racla la gorge, soupira et commença de sa voix la plus solennelle. « Ton papa est mort, m’asséna t-elle, le visage toujours aussi grave. Mort et enterré, enchaîna-t-elle ». Page 27

[…] Mais, vois-tu, tous les rêves ne se réalisent pas. Je n’ai plus les moyens de t’inscrire à l’école d’administration, comme toi-même, ton père et moi l’avions toujours voulu. Page 40-41.

Pourquoi tous les rêves ne se réalisent pas ? Ce propos affirmatif de la mère de Karl vient confirmer que les rêves relèvent de la volonté humaine et ne sont toujours pas conformes à la volonté de cette puissance supérieure, le destin.

Suite à la mort de son père, Karl est forcé par sa mère pour aller poursuivre ses études au séminaire dans l’objectif de revenir  « Prêtre » et financer les études de ses frères car tête et œil de la famille devenait-il.

Karl devenir prêtre ? Et Orphée ? Celle pour qui il nourrit un amour pur et fou. Karl était donc obligé à mettre en rivalité son amour pour Dieu et Orphée. Cette dernière voit son rêve le plus précieux, celui de devenir l’épouse de Karl brisé à cause du choix du sacerdoce fait par ce dernier, quoique ce choix vienne de sa mère qui a su le convaincre sur tous les points.

La nouvelle rencontre entre Karl, déjà prêtre, et Orphée, déjà mariée à Jeannot, deviendra l’élément qui attisera la flamme de l’amour en Karl et constituera une ouverture de brèche pour l’histoire. En effet, l’Abbé Karl « viola » Orphée dans son séjour conjugal et se donna la mort suite aux nombreux messages qui lui ont été envoyés par Orphée afin de lui exprimer son mécontentement face à l’acte du viol. L’Abbé Karl est mort et Jeannot le mari de Orphée s’est suicidé suite à son emprisonnement aux États-Unis.

Orphée était-elle faite pour être très tôt veuve ? Est-ce le destin qui a décidé de la séparer de son amour et de son époux ? Pourquoi l’Abbé Karl s’est-il précipitamment donné la mort quoique les raisons qui l’ont poussé soient presque insignifiantes ? Le destin, qu’est-ce finalement ?

[…] Le destin peut-être finalement que c’est juste moi-même, mes faiblesses et mes lâchetés. Peut-être que tout se serait passé autrement si j’avais dit non et tapé du poing sur la table. Page 179.

Du destin d’abandonner son amour pour devenir prêtre, Karl s’est vu face à un destin qui le condamne au suicide. Quant-à Orphée, elle fut obligée de dire adieu à son amour auparavant et finalement s’est retrouvée précocement et doublement veuve.

  • Du viol à la jouissance maternelle.

Le viol est un acte par lequel une personne en force, impose une autre à avoir des relations sexuelles avec elle.

En effet, après cette fameuse rencontre entre Orphée et Karl, déjà ordonné prêtre, il ne pouvait contenir son amour pour Orphée et la « viola ».

[…] Je venais de pousser une épouse fidèle à la faute. Je l’avais violée. Page 174.

Cet acte de viol a pour conséquence une grossesse or, Orphée, mariée depuis des années n’a jamais eu la chance de porter un enfant dans son giron en dépit de ses nombreux efforts. Malheureusement, la constatation de la grossesse s’est faite après la mort de Karl. L’Abbé Karl et Orphée ne sont-ils donc pas faits pour vivre ensemble ?

[…] Karl a beau le maudire, le plan du destin c’était Orphée pour Yin’dé et Yin’dé pour Orphée. Page 184.

Alors, pourquoi Yin’dé s’est-il donné la mort ? Nonobstant cette mauvaise tournure de l’histoire, Orphée doit s’estimer heureuse car désormais elle portera Yin’dé dans son cœur et ses entrailles.

  • Au-delà d’une thématique

Comme tout artiste, l’écrivain utilise les mots, les procédés stylistiques pour avoir un ensemble cohérent doté de beauté. En effet, hormis le choix de certains mots du vocabulaire de l’amour, du destin, de la trahison, l’auteur a fait usage d’un grand nombre de figure de rhétoriques à savoir : l’analogie, l’anaphore, la périphrase… Il a également fait usage du néologisme. En terme d’exemple, nous avons le terme « gbasseurs » qui est souvent utilisé dans le parler français populaire en Afrique de l’Ouest pour désigner les ensorceleurs. Nous avons aussi ‘’ l’adverbe ‘’ «  Jésus-Christement » employé par l’auteur pour décrire et déterminer la beauté de Orphée.

Hormis ces figures de rhétoriques, nous avons aussi l’usage de l’hypotypose pour décrire la scène de l’acte sexuel entre Karl et Orphée. Cette description amène le lecteur à réaliser l’image du déroulement de la scène dans son imagination. Il vit les actions, les redécouvre et les revit.

[…] Je lui pris la bouche entre les lèvres et me remis à l’embrasser et la caresser.

[…] J’allai et vins, allai et revins encore boire à la fontaine de douceur. Page 170.

Pour ne citer que ceux-là, nous avons également l’utilisation de l’ekphrasis

  • pour mettre en valeur l’art, l’architecture du séminaire propédeutique Saint-Étienne de Banikani :

[ Le portail était taillé en bronze et arborait à chacun de ses battants une représentation du saint patron que coiffait une fière auréole.] Page 55

  • pour décrire la modeste paroisse sainte Thècle-la-grande de la France :

[ Hexagone imparfait de lire de pierre ornées de cubes de granit noir et percés de vitraux « … ».] Page 125.

  • pour mettre en valeur les objets d’arts du musée du Quai Branly :

[…] une impressionnante pléthore de masques, de récades et de statuettes, de trônes africains, taillés avec génie et esthétique dans du bronze, du bois et de l’ivoire africains, en Afrique, par des Africains à qui on a longtemps dénié toute faculté créatrice et innovatrice. Page 130.

Au début du récit, on repère la présence de la transtextualité évoquée par Gérard Genette dans le prologue avec plusieurs passages de la Bible dont Luc 15:19 et Marc 17:21.

Aussi, nous avons une hybridité c’est-à-dire un mixage de genres dans le roman. On remarque la samba écrit sous forme poétique de la page 88 à la page 90.

[…] Mon ouïe qui frémit

Ma bouche qui languit

Mes poils qui vrillent

Mes yeux qui brillent

 

Roland Vivian Kovenan

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