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Cave 72 - Fann Attiki (2021)
La révolution viendra du bar
By Gangoueus Posted in Congo, Gangoueus, Non classé, Roman on 20 septembre 2021 One Comment
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Fann Attiki, Cave 72
Editions JC Lattes, 2021
Prix RFI Voix d’Afriques

Introduction

Nous parlons d’un roman joyeux et original. Trois jeunes congolais discutent à bâtons rompus dans un bar autour de plusieurs bières fraîches. Ils refont le monde, ils papotent autour de leurs lectures de Nietzsche, de Céline ou Dongala. Ils sont bacheliers. Ils ont décroché de l’université qui n’offre, selon eux, aucun débouché. Ils parlementent donc. Ils boivent au goulot chez Maman Nationale, tenancière du bar Cave 72. Ils font financer leurs beuveries légères par des philanthropes qui soutiennent l’enivrement des masses chercheuses de possibilités. On retrouve le cadavre de Black Mic-Mac, un de ces mécènes dans une BMW stationnée à proximité de la Cave 72. Que s’est-il passé ? Ce dernier est le frère du ministre porte parole du gouvernement. Nous partons sur les bases d’un polar tropical, au coeur d’une intrigue politicienne à la sauce congolaise.

Le bar

En plaçant comme lieu de départ, un bar, une « cave »  qui renvoie à une idée de tripot clandestin, en revenant constamment dans cet espace, Fann Attiki pose un des premiers clins d’oeil de son roman. Il procède par dédicace en grand lecteur qu’il est, en revisitant le thème du bar comme lieu de contestation ou de résignation, déjà observé chez les écrivains Daniel Biyaoula, Alain Mabanckou, Patrice Nganang, Fiston Mwanza Mujila ou récemment Max Lobé. On est en Afrique centrale. Début de la parenthèse. Au delà du roman de Fann Attiki, je me demande pourquoi les écrivains de cette aire régionale estiment que les Congolais, les Camerounais seraient moins abrutis par les ravages causés par l’alcool sur les Aborigènes d’Australie ou les Amérindiens. Fin de la parenthèse. Comme indique le jeune écrivain congolais dans le podcast Week-End Africain, le bar est un lieu, au-delà des excès, où l’humanité s’exprime, où elle se défait de la pression d’un système politique extrêmement violent.

L’intrigue politique

A l’instar du bar, l’intrigue politique est aussi un thème exploré par les aînés comme Jean Bofane dans Mathématiques Congolaises, Bedel Baouna dans Brazzaville, ma mère ou encore Isaac Djoumali Sengha dans L’ingratitude du caïman. On retrouve des éléments qui rappellent des faits récurrents dans l’histoire congolaise : Le colonel Olounga veut se faire remarquer. Il dirige la DGST (services secrets congolais). Il est en quête d’une reconnaissance et d’une promotion. Il est sensé tout savoir sur ce qui se passe dans le pays. Les intrigues politiques congolaises ont souvent commencé des conflits autour d’une femme. C’est également le cas dans ce roman. Mais, ce qui est différent chez Fann Attiki, c’est la réaction des victimes collatérales qu’incarnent les trois jeunes de la Cave 72. Peut-être parce qu’ils n’ont rien à perdre mais surtout parce qu’ils sont portés par une pulsion de survivre.

L’écriture

La marque de fabrique de Fann Attiki, c’est à la fois ses emprunts, la maîtrise de sa narration qui se veut chaleureuse, joyeuse tout en traitant de sujets douloureux. Un discours aussi sur l’absurde, l’incompétence malheureuse des exécutants. Si rien n’est vraiment sérieux, la violence exercée par les puissants est bien réelle. Pour ce qui concerne l’écriture du slameur passé à la prose, il y a des séquences portées par un style et un rythme qui rendent plaisantes les descriptions de Brazzaville, des personnages et allègent le propos politique qui ne s’arrête pas seulement sur les absences du Guide national.  Mais c’est aussi le rapport à la langue française qui est questionné, ce cadeau importé et imposé avec ses lots de crimes, qui cohabite avec des bribes de lingala ou de kikongo dans le roman de Fann Attiki. C’est aussi le langage biblique qui structure le roman au pas de la semaine de la Création (cf. la genèse). Tout dans ce roman, dans sa forme, oppose la brutalité de la réalité congolaise à la vitalité du propos et à l’espérance que chuchote l’écriture  de Fann Attiki.
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