Le livre premier « Nécrose et Passion » mêle poèmes sur la mort et le deuil, à des envolées passionnées sur l’Amour. Prophetam meum, ouvre le bal, en donnant à offrir une superbe déclaration d’amour à « Sa reine ». C’est un débordement de sensualités, un rythme effréné, où le Sénégal parle et sert de décor.
Et ta bouche au goût de mangue,
Et tes lèvres senteurs de ces orages,
Juteuses de Saint-Louis
Le poète nous embarque dans cet amour qui bat en plein cœur :
Ces instants-là tu es partout,
Et dans mon sang et dans mes veines,
Sur les nuages qui passent dans l’air vivifiant mes poumons.
Il s’ensuit, des poèmes liés à la mort, peignant tous les sentiments de fin de vie, ou décrivant des périodes sombres, de dépression ou d’état suicidaire. Cette partie aussi se dresse comme engagée, bannissant la concurrence des mémoires, pleurant le Moyen-Orient comme les massacres du Bataclan. Bien que, tristes, ces états sont précisément rapportés : On se sent tantôt vieil homme sous terre, tantôt proche pleurant son frère.
Nécrose ne relate pas uniquement la mort, mais pointe l’éphémère, la dureté, ou la vanité de cette vie.
Le livre deuxième, Révolte, est la note d’espoir de ce recueil. Certes cette partie reste sombre et certains poèmes décrivant les guerres de ce monde auraient pu se retrouver dans la partie Nécrose et Passion. Toutefois, l’auteur y apporte une légèreté, insuffle chez son lecteur, un lendemain des possibles. Comme avec Diluculum, qui se sert du lever du jour comme métaphore, à la fin d’un chaos.
La nuit se départit de son sinistre manteau,
Quand les assourdissantes litanies supplantent le silence des écriteaux
Le coq sonne le réveil et comme un essaim d’abeilles les cases s’éveillent.
Pour ce qui est de la forme, Chœur à cœur est un recueil riche d’allitérations, agréable à déclamer, sons et rythmes, sont en joie.
Il se peut que Khalil Diallo ait un faible pour le slam, car on retrouve des clins d’œil faits au célèbre Souleymane Diamanka, qui se décrit comme le poète peul amoureux, quand Khalil Diallo se surnomme « poète maure amoureux ».
Toutefois, je déplore un certain grand écart culturel entre Sénégal et Monde Antique occidental, qui par les va-et-vient spatio-temporels peut empêcher le lecteur de s’ancrer.
De plus, il y a de nombreux poèmes où le poète se met en scène, use à foison, du champ lexical de la poésie. Cette mise en abyme du poète qui se regarde écrire, quoique sincère, gêne la fluidité des thématiques, le lecteur peut avoir l’impression d’un magicien qui dévoile « ses trucs ».
En somme c’est un recueil assez diversifié, avec des thèmes antagonistes, qui font sa richesse. L’amour et la passion constituent les angles de traitement où résident les pépites de ce Chœur à Cœur.
Commentaires récents